Par un parent de la communauté Adopt4Life
Le partage que je m’apprête à faire est très personnel. Inavouable, en fait.
Mon mari et moi en étions bientôt à un an de traitements de fertilité lorsque ma mère nous a dit qu’en cas d’échec, elle pensait qu’il valait mieux trouver une mère porteuse. « Faites ce que vous voulez, mais n’adoptez pas. Les enfants adoptés ont tous des problèmes. »
Ouep. Le seul fait d’admettre que ma mère a prononcé ces mots est difficile.
Apparemment, la mère de ma mère lui aurait dit que si elle n’avait jamais pu avoir d’enfant par elle-même, elle n’en aurait pas adopté non plus, « parce que les enfants adoptés sont tous perturbés. » Bien sûr, ma grand-mère vivait dans un pays différent et à une époque différente. Mais peut-être suis-je seulement en train de lui trouver des excuses.
Ma mère a une cousine adoptée. Durant son adolescence, lorsque cette cousine se retrouvait dans l’eau chaude pour être sortie en catimini le soir afin d’aller voir les garçons ou pour un autre comportement inapproprié ou indigne d’une jeune personne de bonne famille, ma grand-mère et ses sœurs disaient que c’était parce qu’elle n’était pas « vraiment une [insérer le patronyme]. » Je suppose qu’en se distançant elles-mêmes de ce comportement jugé inacceptable, cela les faisait sentir mieux.
Les croyances se transmettent souvent à travers les générations. Dans mon cas, le message flottait silencieusement autour de nous, empreint d’une invisibilité tangible sans toutefois être prononcé à voix haute. Ces messages implicites sont souvent ceux que nous assimilons le plus profondément; ils pénètrent notre subconscient et sommeillent au fond de nous, s’y tapissant parfois pendant plusieurs années avant de se rappeler à nous de manière inopinée.
Entendre ma mère me dire que nous ne devrions pas considérer l’adoption a fait très mal, même si je n’étais pas vraiment surprise. J’avais également eu cette réflexion (quelque part, dans une petite mesure), que tous les enfants adoptés sont perturbés, défectueux, endommagés. Bien sûr, rien de cela n’est rationnel. Ma propre famille est particulièrement au fait des chagrins et des difficultés qui peuvent s’abattre sur un enfant biologique et le stress dévastateur résultant pour la famille; mon frère aîné s’est suicidé à l’âge de 16 ans après s’être battu sa vie entière contre la maladie mentale. À ce moment-là, mon mari et moi ne considérions pas l’adoption, nous poursuivions plutôt des traitements de fertilité. Il y avait plusieurs raisons à cela et parmi celles-ci, il y avait la crainte que ma mère aime les enfants de mon frère, ses petits-enfants biologiques, davantage que mon enfant adopté, et que mon enfant, bien sûr, le réalise et en soit grandement affecté.
J’ai eu une sérieuse conversation avec ma mère à ce sujet et je pensais avoir clos le sujet (du moins, en apparence). À cette époque et à ma grande surprise, ma mère a un peu plus tard suggéré de nouveau que nous cherchions une mère porteuse plutôt que de considérer l’adoption. Argh...! De toute évidence, le message ne passait pas. Son propre préjugé était si fermement ancré en lui qu’il faudrait plus que quelques mots pour changer son point de vue.
Plusieurs de nos amis ont adopté des enfants. Ces amis ont pavé la voie de notre parcours, non seulement en partageant leur propre cheminement, mais en nous montrant à quel point des familles heureuses, aimantes et réussies peuvent être formées par le biais de l’adoption. Nous adorons leurs enfants et n’est-il pas déchirant de penser que ces adorables, formidables et brillants enfants auraient pu ne jamais trouver leurs familles permanentes, et auraient possiblement vécu leur jeunesse en famille d’accueil?
Plusieurs années se sont écoulées depuis ceci. Nous sommes récemment devenus les parents adoptifs d’un adorable bambin de deux ans et demi, qui a rapidement conquis nos cœurs. Est-ce que je me surprends à chercher des signes précurseurs de problématiques qui pourraient survenir en raison de ses origines? Oui. Mais je sais que si j’avais conçu moi-même un enfant, je me serais inévitablement inquiétée de la possibilité que, comme mon frère, il soit aux prises avec une problématique de santé mentale. Et ma mère? Elle est très éprise de son nouveau petit-fils. Et comment s’en empêcher?! Il est astucieux, extraverti, mignon comme tout et déborde de joie de vivre et de fou rire. C’est avec joie, amour et le cœur à la fête que ma famille a accueilli mon fils en son sein. Ce message invisible tourbillonne maintenant autour de nous, pénètre profondément nos psychés et est transmis avec le temps. Avec un peu de chance, mes petits-enfants apprendront comment j’ai formé une famille et comprendront d’où leurs propres sentiments d’ouverture et d’acceptation proviennent.
Les opinions exprimées dans les blogues publiés sont celles de leur auteur et ne reflètent pas la position officielle d’Adopt4Life. Nous respectons la diversité d’opinion au sein du milieu de l’adoption et espérons que ces blogues susciteront des échanges constructifs. Find out how to share your story.