Par Julia Ross, un parent de la communauté d’Adopt4Life
Difficile de savoir par où commencer, mais je suppose que le jour où j’ai eu un coup de foudre au premier regard est un bon début.
C’est par une nuit froide et enneigée du mois de mars que je l’ai rencontrée. Elle avait treize mois et elle m’a tendu les bras comme si j’étais quelqu’un qu’elle avait toujours connu.
Les semaines, les mois se sont écoulés. Le jour de la finalisation de son adoption, lorsque le juge a dit : « Je vous déclare maintenant une famille pour la vie », est gravé dans ma mémoire. À aucun moment il ne m’est venu à l’esprit que je devrais la laisser partir.
Avec les années sont apparus les diagnostics, les comportements traumatiques, les comportements dangereux, l’automutilation, les mensonges, la manipulation et tout ce qui se trouve entre les deux. Il y a eu des relations tendues et un mariage avec mon amoureux du secondaire qui n’a tenu que par un fil bien usé pendant des années.
Sans le vouloir, essayer de lui trouver de l’aide, m’assurer qu’elle était bien et que son environnement était adéquat pour elle était devenu mon travail à temps plein. J’ai contacté la SAE plus d’une douzaine de fois, demandant de l’aide, implorant de l’aide. J’ai même appelé le service de prise en charge pour rapporter une possibilité de mise en danger d’enfant, tellement j’étais inquiète pour mes autres enfants. Chaque fois, ils me demandaient : « S’agit-il d’un échec d’adoption? », et chaque fois, je les suppliais de m’aider à ce que ce ne soit pas le cas… Ils ne pouvaient rien faire pour nous sans que nous devions l’abandonner.
Je dormais avec les portes ouvertes. Je ne la laissais jamais seule dans une pièce. Elle n’était jamais hors de portée de voix. Ultimement, après une série d’événements dangereux, j’ai dû la laisser partir. Je n’étais plus en mesure d’assurer à la fois sa sécurité et celle de mes autres enfants sous un même toit. Ce qui s’est ensuite passé est difficile à raconter, car une grande partie est floue dans ma mémoire.
Je me rappelle par contre que l’on m’a dit encore et encore que, à moins que je ne renonce à mes droits parentaux, nous n’aurions aucune aide. On m’a aussi dit que nous devrions comparaître devant un juge et prononcer les mots. Nous aurions à dire à voix haute que nous l’abandonnions, devant tout le monde, y compris notre fille.
Je n’avais aucune idée de comment j’allais réussir à le faire, mais je savais que ce que l’on me demandait était impossible. Je n’aurais jamais pu ouvrir la bouche pour prononcer ces mots-là.
J’ai utilisé les médias sociaux, j’ai contacté chaque personne sur la surface de la Terre avec qui j’avais déjà eu une conversation et je les ai suppliées de partager notre histoire et de m’aider à trouver les appuis dont nous avions besoin pour demeurer une famille, même si nous ne pouvions pas rester sous le même toit.
Quelques semaines avant que nous ne devions renoncer à nos droits parentaux, nous avons trouvé notre ange. Elle avait toujours été là. Une force de la nature, une maman incroyable que j’avais rencontrée alors que ma fille n’avait que deux ans. Elle était tellement ouverte d’esprit et déterminée à soutenir notre famille et à nous aider à construire une solution unique pour notre bébé.
Douze ans et cinq mois après que ma fille m’avait tendu les bras, j’emballais ses affaires.
Je ne la verrai plus chaque jour, je n’aurai plus la chance de lui préparer son souper préféré, je ne l’entendrai plus rire d’elle-même après avoir été maladroite. Mais, je saurai qu’elle est en sécurité; ma famille pourra commencer à guérir et je demeurerai sa maman.
Quand je repense à toutes ces fois où j’ai cherché de l’aide et que pour seule réponse on me demandait si c’était un échec d’adoption, je ne peux m’empêcher de penser à comment les choses auraient pu être différentes si on avait simplement pu retirer cette option de l’équation.
Et s’il y avait du soutien en place pour veiller à la continuité des liens d’attachement? Et si nos enfants qui en ont le plus besoin pouvaient tous nous avoir?
Parce que rien de tout ceci n’est à propos de l’abandon ou de l’échec. Il s’agit de trouver les meilleures solutions pour nos enfants, soutenir les besoins individuels en matière de santé mentale et établir nos attentes en termes de succès, pas d’échec.
Rien de tout ceci n’a été un échec.
Tout cela a été une percée.
Les opinions exprimées dans les blogues publiés sont celles de leur auteur et ne reflètent pas la position officielle d’Adopt4Life. Nous respectons la diversité d’opinion au sein du milieu de l’adoption et espérons que ces blogues susciteront des échanges constructifs.